Les accusations de complotisme et de
conspirationnisme gangrènent désormais le discours
public et même privé. Elles fusent comme des balles
lorsqu’il s’agit de vilipender, sur les réseaux sociaux,
quiconque émet un doute concernant certaines décisions
sanitaires des autorités publiques en cette année 2020
où un virus, le Covid-19, serait devenu l’ennemi no 1.
Il serait extrêmement instructif de savoir où et comment
ces accusations ont gagné en popularité, mais chose
certaine, il est crucial de remettre les pendules à
l’heure.
J’assume que bien des gens ignorent la
gravité du propos. Un complot ou une conspiration, selon
le Petit Robert, est un accord secret entre deux
ou plusieurs personnes dans le but d’attenter à la
sûreté ou à la vie d’autrui, de menacer une institution
ou le pouvoir établi. La plupart des complots dignes de
ce nom restent dans l’ombre ou du domaine de l’hypothèse
par manque de témoignages et de preuves. À mon sens, à
l’échelle collective, il y a un risque réel d’attentat
conspirationniste dès qu’il y a un gain d’argent et/ou
de pouvoir en vue.
Les exemples abondent dans l’histoire,
y compris à la tête de la plupart des États : pactes
mafieux, tractations diplomatiques, prises de possession
de compagnies et d’institutions, coups d’État par la
police ou l’armée… Le maître-mot : le secret. Le
Québec ne fait pas exception. Le haut-clergé de l’Église
catholique, par exemple, était passé maître dans l’art
d’agir en coulisses pour obtenir le maximum de pouvoir,
de capacité financière et même de permissivité, avec les
dérives sordides que l’on connaît.
Par ailleurs, bien des individus
ultrapuissants, conspirationnistes invétérés, souillent
l’histoire du Québec après la Conquête de 1760.
L’impérialisme ouvrait bien des portes, dont celle de
déposer des projets de lois en catimini au Parlement de
Londres. À ce titre, le Cabinet britannique et le
ministère des Colonies pourraient subir un méga-procès
pour complotisme : loi d’Union avec l’Ontario en 1822,
lois établissant des compagnies foncières dotées d’une
énorme quantité de terres publiques en 1830, loi
abolissant la Chambre d’Assemblée et instaurant un
Conseil spécial en 1838, loi instaurant le Canada-Uni en
1841, loi instaurant la Confédération canadienne en
1867…
Et que dire des hommes d’affaires,
sinon qu’ils s’en sont permis cent fois plus? Du monde
juridique,en situation de collusion malsaine avec la
classe dirigeante, préliminaire du complotisme?
L’indépendance et l’impartialité des juges, en
particulier, éclate trop souvent en morceaux lorsqu’il
s’agit d’une cause politiquement sensible ou lorsqu’il
s’agit de protéger « l’ordre établi », c'est-à-dire les
privilèges d’un cercle d’amis haut placés. Quant à
l’industrie médicale…
Oui, le monde médical, noyé par un
raz-de-marée de billets de banque, d’investissements
publics et de dons philanthropiques bassement
intéressées. Les risques de dérive conspirationniste
sont astronomiques, car l’argent achète bien des
consciences. Depuis longtemps, il y a matière à enquête
sur les liens entre cette énorme industrie et les
politiques publiques. Pourtant, en 2020, ce sont plutôt
les voix d’individus n’ayant aucun levier pour comploter
qui sont censurées sous l’effet d’une peur contagieuse.
Ça aussi, l’histoire a déjà vu. Et c’est le plus
effrayant.
Le 1er septembre 2020 |