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En 1833, il fait bon vivre en Bas-Canada, colonie prospère d’Amérique. Gilbert, instituteur à Montréal, a du fil à retorde avec la plaisante Caroline, qui vend ses charmes et défend chèrement son indépendance. Sa sœur Vitaline, qui vient de lier son sort à celui d’un marin de Saint-Denis, déploie sa sensibilité d’artiste. Tous deux aspirent à une existence conviviale mais libre, inspirée par un idéal égalitaire. La Chambre d’Assemblée du Bas-Canada dénonce opiniâtrement les injustices, et les « tuques bleues », ou patriotes aux principes démocrates, la soutiennent par un esprit frondeur. Or, la situation se dégrade dans une Province of Quebec faisant partie de l’empire britannique. Tenant à assurer son pouvoir même par la force brute, une coterie de profiteurs enclenche une impitoyable mécanique de répression. En 1837, les tyrans commettent l’irréparable. Sous le couvert d’une rébellion, c’est une guerre de reconquête qui fait rage… La terreur militaire se déploie. Vitaline et son frère font partie d’une nation courbant sous le joug du despotisme, victime de pillages, de violences et d’incendies. Quantité de tuques bleues croupissent en prison ou en exil. Sous la brutalité du châtiment, l’insoumission patriote devient une irréductible révolte. L’heure de la vengeance sonne à l’automne 1838. Hélas ! Les profiteurs qui accaparent le pouvoir ont des provocateurs et des espions à leur solde... Pour traverser les épreuves sans trop pâtir, pour garder la tête haute et l’esprit frondeur, Vitaline et Gilbert tâchent d’entretenir, bien vivante, la flamme de l’amour.
Les tuques bleues, qui comprend Le charivari de la liberté et Le règne de la canaille, constitue le second cycle d’une fresque romanesque patriote. Le premier cycle, soit Le pays insoumis, comprend Les chevaliers de la croix et Rue du Sang. Les deux cycles peuvent se lire indépendamment l’un de l’autre, même si le second constitue la suite du premier, avec la même galerie de personnages et un récit qui poursuit son cours.
Les sources documentaires L’absence d’une recherche événementielle intégrale et complète, conduisant à une chronologie trop bien documentée pour être remise en doute, est un écueil sur lequel je me suis vitement butée. Bien des théories ont été émises sur le pourquoi et le comment des mal nommées Rébellions, mais le récit historique est partiel et suranné, encombré de biais et encore pis, volontairement censuré par les historiens d’autrefois. Nul n’avait constitué un récit historique exhaustif et impartial pour mettre en lumière la vie de nos ancêtres sur une base concrète, et qui rende justice à la diversité, à la complexité et surtout à la modernité de ce parcours ; qui rende justice, également, à la recherche historique du dernier demi-siècle. J’ai donc pris contact avec les acteurs et actrices des événements afin de tracer le portrait le plus fidèle possible du peuple canadien d’antan et de son périple vers la prise d’armes de novembre 1837. J’ai porté une attention particulière aux faits et gestes des « ennemis » des patriotes, ces ultra-tories qui n’ont pas hésité à brandir leur fusil et à se travestir en volunteers à la solde de l’armée pour imposer leur loi. Leur présence était palpable dans moult documents d’époque consultés. Quelques historiens se sont avancés sur ce chemin peu fréquentés, et en tout premier François Deschamps, auteur de La « rébellion de 1837 » à travers le prisme du Montreal Herald (tiré de son mémoire Le radicalisme tory à travers le prisme du Montreal Herald et la mobilisation des milices dans les districts de Montréal (1834-1837), UQÀM, 2012). Il me faut aussi mentionner Steven Watt : Authoritarianism, Constitutionalism and the Special Council of Lower Canada, 1838-1841, thèse de doctorat, McGill, 1997. Sur les excès du pouvoir exécutif, dans la colonie comme dans la mère patrie, je me suis fiée aux gazettes et à maints documents d’époque : échanges épistolaires, documents de la Chambre d’Assemblée, livre et pamphlets signés par des contemporains. J’ai également puisé dans les papiers d’État tels que colligés par les archivistes de Bibliothèque et Archives Canada (Rapport des Archives du Canada pour les années 1900, 1929, 1930 et 1931, 1935 à 1937, 1941); dans ceux imprimés sur ordre de la Chambre des Communes de Londres (British Parliamentary Papers, vol. 7 à 12, Irish University Press); et dans quelques ouvrages d’historiens tels la thèse de Philip Goldring, Lord Howick and Lower Canada, 1830-1838; le livre de G. C. Moore Smith, The life of John Colborne, Field-Marshal Lord Seaton ...; et Robert Christie, A History of the Late Province of Lower Canada…, volumes 3 à 5. Plusieurs biographies m’ont été particulièrement utiles : Le notaire Girouard, patriote et rebelle, de Béatrice Chassé, thèse de doctorat, Université Laval, 1974 ; Journalist and judge : Adam Thom’s British North American Career, 1833-1854, de Kathryn M. Bindon, mémoire de maîtrise, Queen’s University, 1972 ; Edmund Bailey O’Callaghan, Irish Patriote, de Robert Charles Daley, thèse de doctorat, Université Concordia, 1986. J’ai puisé aux souvenirs de Sydney Bellingham, publiés sous le titre Some personal recollections…, ainsi que dans les notes originales colligées par les archivistes de Bibliothèque et Archives Canada (MG24B25, Fonds Bellingham, vol. 2). S’il n’existe encore aucune étude exhaustive et définitive sur les charivaris en Bas-Canada, l’historien René Hardy s’intéresse de près au phénomène. Il a signé « Le charivari dans la sociabilité rurale québécoise du 19e siècle », dans Roger Levasseur : De la sociabilité : spécificité et mutations ; « Le charivari : divulguer et sanctionner la vie privée ? » dans Manon Brunet et Serge Gagnon : Discours et pratiques de l’intime ; « Le charivari dans l’espace québécois », dans Serge Courville et Normand Séguin : Espace et culture. Parmi les témoignages d’époque sur le charivari figurent les journaux personnels d’Olivier Robitaille et de Romuald Trudeau (Mes Tablettes), à la BANQ, ainsi que le témoignage de Jean-Marie Mondelet pendant la Grande Enquête de la Chambre d’Assemblée, 1832 à 1834, sur la Rue du Sang (Appendice du XLIIe volume des Journaux de la Chambre d’Assemblée de la province du Bas-Canada et Appendice du XLIIIe volume des Journaux de la Chambre d’Assemblée de la province du Bas-Canada. Témoignages et documents ont été réunis dans Enquête devant la Chambre d’Assemblée du Bas-Canada sur les événements du 21 mai 1832, à Montréal.) Enfin, mes plus importantes sources pour comprendre la dynamique sociale des charivaris ont été : « Discordant Music : Charivaris and Whitecapping in Nineteenth-Century North America », de Bryan D. Palmer, Labour/Le travailleur, 3, 1978; « Le Charivari au Canada » et « Un charivari à Québec », de E. Z. Massicotte, BRH, 32, déc. 1926, et 44, août 1938; « À propos du charivari : discours bourgeois et coutumes populaires », de Rolande Bonnain-Moerdyk et Donald Moerdyk, Annales ESC, mars-avril 1977, 32, 2; Habitants et patriotes : la rébellion de 1837 dans les campagnes du Bas-Canada, de Allan Greer; Fête et révolte : des mentalités populaire du 16e au 18e siècle, de Yves-Marie Bercé; La fin des terroirs, de Eugen Weber; Society and culture in Modern France, de Nathalie Zemon Davies. L’attentat sur Salomon Barbeau est décrit dans les gazettes de l’époque, mais également dans Rapport du comité spécial, auquel ont été renvoyés les documents relatifs à l'enquête qui a eu lieu devant le coronaire de Montréal, sur le corps de Solomon Barbeau…, Appendice Y, Appendice du XLIIIe volume des Journaux de la Chambre d’Assemblée de la province du Bas-Canada, session 1834. Concernant Valentin Jautard, je me suis inspirée de Valentin Jautard, 1736-1787, Premier journaliste de langue française au Canada, de Jean-Paul de Lagrave et Jacques G. Ruelland; Les journalistes démocrates au Bas-Canada (1791-1840), de Jean-Paul de Lagrave. J’ai documenté les élections générales de 1834, l’un des secrets les mieux gardés de l’histoire du Bas-Canada, principalement grâce aux gazettes d’alors ; mais également grâce à Relation historique des événements de l’élection du comté du Lac des Deux-Montagnes… attribuée à Jean-Joseph Girouard; Aux Libres et Indépendants électeurs du Quartier Ouest de Montréal, adresse de Louis-Joseph Papineau du 3 décembre 1834 (La Minerve, 4 et 8 décembre 1834, repris dans Un demi-siècle de combats); The Daily Advertiser : What is the Result of the Elections? Fully Answered; procès-verbaux de réunions du conseil de ville, Archives de la Ville de Montréal; Les élections générales de 1834 (Bas-Canada) et les élections générales de 1841 (ancien Bas-Canada), de Marc Bolduc, mémoire de maîtrise, UQAM, 1997. L’attentat sur Louis Marcoux et le procès de ses assaillants prennent une large place dans les gazettes de l’époque ; une brochure lui a été consacrée sous le titre The Trial of Isaac Jones and James Jones, for the alleged murder of Louis Marcoux at the bar of the Court of King’s Bench for the district of Montreal…, reported by Thomas Handcock. L’élaboration d’un descriptif exhaustif pour les années 1837 à 1839 a accaparé une bonne part de mes énergies. Là encore, les gazettes ont été une mine de renseignements, à laquelle j’ai ajouté les sources suivantes :
Recherches d’historiens : Charles Bellemare, Saint-Charles 1837 et la survie d’un peuple menacé, 2005. Jean-Paul Bernard, Assemblées publiques, résolutions et déclarations de 1837-1838, 1988. Pierre-Bernard Cadieux, Le Saint-Athanase démographique et économique et le Saint-Athanase politique au temps des rébellions, mémoire de maîtrise, UQAM, 1996. Henry Samuel Chapman, An Impartial and Authentic Account of the Civil War in the Canadas. Bruno Cyr, La radicalisation et la militarisation des Loyaux et des Patriotes à Montréal en 1837, mémoire de maîtrise, UQAM, 2005. Réal Fortin, La guerre des patriotes le long du Richelieu, 1988. Elinor Kyte Senior, British Regulars in Montreal, An Imperial Garrison, 1832-1854, 1981. Elinor Kyte Senior, Les habits rouges et les patriotes, 1997. Elinor Kyte Senior, « The Provincial Cavalry in Lower Canada, 1837-50 », dans Canadian Historical Review, 67, 1, mars 1976. Martin Lanthier, La violence selon la presse patriote et loyale à la veille de la rébellion de 1837, mémoire de maîtrise, UQAM, 1997. Gilles Laporte, Patriotes et Loyaux, 2004. Pierre Meunier, L’insurrection de 1837 à Saint-Charles et le seigneur Debartzch, 1986. J.-B. Richard, Les événements de 1837 à Saint-Denis-sur-Richelieu, Société d’histoire régionale de Saint-Hyacinthe, 1938. Robert-Lionel Séguin, La victoire de Saint-Denis, 1964. www.1837.qc.ca (Les patriotes de 1837@1838). www.jonathanlemire.com (Histoire de 1837-1838).
Documents d’époque édités : Georges Aubin et Nicole Martin-Verenka: Insurrection I, Examens volontaires 1837-1838; Insurrection II, Examens volontaires 1838-1839. Georges Aubin : Au Pied-du-Courant, Lettres des prisonniers politiques de 1837-1839 ; Amédée Papineau : Journal d’un Fils de la Liberté, 1838-1855. Georges Aubin et Renée Blanchet : correspondances de Louis-Joseph Papineau, Julie Papineau, Amédée Papineau, Wolfred Nelson, Siméon Marchesseault, Jean-Philippe Boucher-Belleville, Louis Perrault, André Ouimet. Georges Aubin et Jonathan Lemire : Ludger Duvernay, lettres d’exil, 1837-1842. Procès politique : la Reine vs Jalbert, accusé du meurtre du lieutenant Weir… Résumé impartial de la discussion Papineau-Nelson sur les événements de Saint-Denis en 1837 et Papineau et Nelson : Blanc et Noir… ; ainsi que ce qui a été publié dans les journaux La Minerve et L’Avenir (1848-1850).
Fonds d’archives : 1) BANQ-Q, E17 (Fonds Ministère de la Justice), S37 (Événements de 1837-1838, 5 janvier 1837-14 octobre 1840) et l’index publié dans le Rapport des Archives du Québec 1925-1926. 2) BANQ-Q, R2 (fonds gouverneurs, régime anglais), S2 (correspondance), P293. 3) BANQ-VM, P224, Collection rébellion de 1837-1838, 18 août 1837-15 décembre 1877. 4) BAC MG24B31 : Fonds Henry Samuel Chapman. 5) BAC MG24B128 : Fonds du Comité de correspondance de Québec. 6) BAC MG24B6 : Fonds Denis-Benjamin Viger. 7) BAC MG24B28 : Fonds Joseph-René Kimber. 8) BAC MG24B27 : Fonds Charles-Elzéar Mondelet. 9) Archives du musée McCord : P195/A103, fonds de la famille Badgley, chemises 9 et 10 (circulaires, pétitions et correspondance relatifs à la Montreal Constitutionnal Association ; correspondance familiale). 10) Archives du musée McCord : C019, Collection de Rocheblave, Bouthillier, Routh.
Je tiens à souligner la collaboration précieuse de Béatrice Chassé, pour le don de son matériel de recherche sur Jean-Joseph Girouard; de François Deschamps, pour ses éclaircissements et le partage de sa documentation; et de Georges Aubin, qui donne un sérieux coup de mains à l’avancement de la science historique québécoise. Non seulement collige-t-il patiemment, puis fait éditer (avec la collaboration de Renée Blanchet) diverses correspondances de l’époque patriote, dont celle du clan Papineau, mais il partage généreusement ses propres outils de recherche et sa documentation, y compris les corpus de correspondance ou des textes non publiés (notamment de Jacques-Guillaume Baudriau, Théophile Bruneau, Philippe Gareau, Amédée Papineau et Denis-Émery Papineau).
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