Les accoucheuses
-1: La fierté -
-2: La révolte -
-3: La déroute -

Histoire inédite des Patriotes

Le pays insoumis

Les tuques bleues

Autres roman et nouvelles

Gratien Gélinas

Marie Gérin-Lajoie

Études historiques

 

À lire:
Jasettes archivées

 

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Anne-Marie vous pique une jasette…

Le charivari est une coutume oubliée depuis trop longtemps. Forme de justice populaire sur un mode enjoué, le charivari remonte à des temps immémoriaux. De coutume, les hommes qui convolent en noces dépareillées ou qui sont coupables de mauvais traitements (inceste, violence conjugale) se méritent un tintamarre nocturne au terme d’une cavalcade masquée. De surcroît, les citoyens recourent spontanément aux performances charivaresques lorsque toute autorité constituée, même le gouvernement exécutif d’un État ou d’une région, écrase l’opposition légitime en dépassant les bornes de la légalité, de l’éthique et du respect.

Or, la Province of Quebec est plongée dans une crise sociale provoquée par l’élite au pouvoir, corrompue jusqu’à la moelle, et qui culmine avec les Rébellions de 1837-1838. Le peuple et ses représentants élus tentent de réduire les privilèges et l’enrichissement personnel éhonté d’une coterie de privilégiés soutenus par l’Exécutif de la colonie, dont les potentats de Montréal. Pour faire taire les patriotes, ils « fomentent le trouble » au moyen d’intimidation et de coercition. Les charivariseurs dénoncent ces semeurs de zizanie en déployant l’arsenal de leurs talents : cortèges silencieux à cheval, le cavalier tourné vers l’arrière; grotesques pantins suspendus en effigie; chansons et slogans irrévérencieux; tapage et crécelles…

Le premier mai 2014
 

www.mndp.qc.ca

Je permets qu’on fasse ici Charivari! Joyeux tintamarre à la Maison nationale des Patriotes : l’auteure Anne-Marie Sicotte et Éditions Fides proclament Le Charivari de la liberté, premier tome du second cycle d’une épopée romanesque, Les tuques bleues, campée dans le Québec au temps des Rébellions. Gilbert, instituteur à Montréal, et sa sœur Vitaline, qui vient de lier son sort à celui d’un marin de Saint-Denis, aspirent à un idéal égalitaire où nul n’est l’esclave d’autrui. Or, la tragédie de la Rue du Sang reste impunie et le pouvoir militaire étend son emprise. Avec opiniâtreté, les députés patriotes à la Chambre d’Assemblée dénoncent les injustices, et les « tuques bleues » les soutiennent en affichant esprit frondeur et ferveur révolutionnaire. Mais une coterie de profiteurs s’impose par la force brute, jusqu’à commettre l’irréparable en 1837… La galerie de personnages créés dans Le pays insoumis reprend vie, entremêlant l’intime à la grande histoire et une nation à son avenir. Lancement et séance de signatures le lundi 19 mai, Fête des Patriotes, entre 11h et 18h, au 610 chemin des Patriotes, Saint-Denis-sur-Richelieu. Une promenade patriote, animée par la villageoise Marie-Marie et par l’auteure Anne-Marie, est offerte sous réservation. Informations : 450-787-3623 ou maison.patriotes@qc.aira.com

 

 

Le Charivari de la liberté, un extrait

        Un sifflement perçant attire l’attention de Vitaline, qui tend l’oreille vers le village. Le son lointain charriait une tangible raillerie… S’y passe-t-il quelque chose de conséquence? Depuis le début de l’été, la contrée est balayée par un courant d’exaspération, par une susceptibilité à fleur de peau qui donne envie de se moquer de tout et surtout des grichous qui se permettent des vilenies dont ils se vantent ensuite. En contrepartie, les éclats de rire grinçants et les pas de gigue d’un remue-ménage festif ne demandent qu’à jaillir!
        D’autres sifflements, sur tous les tons, ont ponctué le premier. Des éclats de voix… des trots de chevaux… Alertée, Vitaline replace son chapeau de paille sur sa tête, avant de lancer à l’adresse de Florentin :
        –Un bredas s’annonce sur la route. Tu viens voir?
        –P… pour le sûr. Juste un instant.
Vitaline trépigne sur place. Elle ne veut rien manquer d’un éventuel spectacle, car elle en tire chaque fois une joie sauvage qui se mesure à l’aune de ce qu’endurent ses concitoyens et elle-même, depuis une éternité, en terme de vexations et d’affronts. La coupe de l’humiliation collective déborde! Enfin, Florentin se relève avec une grimace pour son dos endolori, puis la précède vers l’avant de la maison. Le seul autre membre de la famille qui soit présent, Normande, y est déjà, à plisser les yeux en direction du bourg.
        Un nuage de poussière s’élève à quelques arpents sur le chemin du Bord-de-l’eau. Une exclamation leur parvient : « À bas Déberge! » En réaction, Normande s’écrie d’une voix aiguë :
        –Le seigneur? Y figure dans l’affaire?
        Vitaline se tend comme un arc. Chaque jour qui passe fait monter d’une coche son sentiment d’irritation envers le gouvernement exécutif de la colonie. Lord Gosford s’arrange pour que la Proclamation du 15 juin brimant le droit de manifester soit mise en force par quiconque possède un semblant d’autorité : officier de milice, juge de paix et même curé en chaire. Ce qui cause des heurts dans les localités où se trouvent de prétentieux et serviles faquins, trop contents de se faire le relais de l’Exécutif afin de faire étalage de leur obséquiosité, par après, pour quémander des faveurs.
        Les abus de pouvoir sont contreboutés par un esprit frondeur qui frise la bravade. À Saint-Denis, par exemple, le banquet de la Saint-Jean-Baptiste s’agrémentait d’une pièce montée, soit une tête de veau tenant dans sa gueule un parchemin personnifiant la proclamation imprimée et un exemplaire du papier-nouvelles Le Populaire. Dans un paroxysme de théâtralité, les torche-culs ont été jetés à travers la fenêtre avec des interjections méprisantes.